Cette année-là………
Cette année-là………
Quand le temps aura fait son œuvre et que le présent s’effacera devenant passé et que le futur sera présent, que restera-t-il de cette année scolaire 2019-2020 ? Les écoliers, collégiens, lycéens et étudiants d’aujourd’hui désormais parents ou grands-parents ; que diront-ils à leurs descendants de cette année si particulière ? Écrire permet de fixer les événements. Si Anne Franck n’avait pas tenu un journal, qui aurait connu les joies, les peines, les espérances de cette jeune fille dont la vie a été si courte ?
Je n’ai nullement l’intention de devenir aussi illustre qu’Anne Franck mais je veux relater l’année 2019-2020 pour toi, élève, pour que tu puisses les raconter à tes enfants, et que tes enfants puissent, à leur tour, les dire à leurs enfants.
« Les hommes mangeaient, buvaient, se mariaient et mariaient leurs enfants, jusqu’au jour où Noé entra dans l’arche ; le déluge vint, et les fit tous périr. » (Luc 17, 27)
Ainsi vivions-nous jusqu’à une première alerte. Il y avait bien eu les gilets jaunes qui, manifestant leur mécontentement, mettaient à mal bien des habitudes. Ce n’était rien par rapport à ce que nous allions vivre un certain 26 septembre 2019. Dans la nuit, ou au petit matin pour les lève-tôt, un incendie de l’usine Lubrizol à Rouen créa la panique. Il fallut pendant quelques jours mettre les élèves en vacances. Avant leur retour, au petit matin, chaussés de bottes, nous avons, avec l’aide d’une société, nettoyé l’Institution. Cet incendie n’a pas permis le traditionnel apéritif dînatoire de fin septembre. Ce temps festif était l’occasion d’une rencontre entre les familles autour d’un apéritif agrémenté des chants des élèves. Nous pensions reprendre notre vie tranquillement…
L’année 2020 débute : l’année 20/20. En janvier, bien sûr nous commencions à vaguement entendre parler du coronavirus qui faisait des ravages dans une province bien éloignée de nous, en Chine : Wuhan, nom inconnu en Occident. Nous étions loin de nous douter que quelques semaines plus tard Wuhan serait mondialement connue ! La COVID qui était en Chine a traversé les mers et océans pour s’installer dans le monde entier et nul lieu ne lui échappe, aucun village d’irréductibles ne lui résiste !
Le jeudi 12 mars, on nous annonce que le coronavirus circule en France et, fait inédit, il est dit qu’à compter du vendredi 13 mars au soir, l’école se fera à la maison et ce, sans que l’on puisse dire quand le retour à l’école se fera. En entendant cette nouvelle, je suis sûre que des millions d’écoliers français ont crié leur joie. S’ils avaient su ! Le vendredi 13 mars au soir, chaque élève part avec ses cahiers et livres sans savoir quand il reviendra.
Commence un temps particulier : le confinement. Parents et enfants travaillent à la maison, il faut s’organiser : qui aura l’ordinateur et quand ? Mince… il faut imprimer les devoirs envoyés par l’école, mais plus d’encre dans l’imprimante et plus d’encre dans les grandes surfaces. Les maîtresses rejoignent les élèves pour des visioconférences.
Les parents découvrent qu’être enseignant c’est un métier ! Un enfant de trois ans résume bien la situation en disant à sa maman : « Je t’aime bien comme maman, mais pas comme maîtresse ! »
Depuis le confinement, c’est le bel été alors que nous avions connu le froid et la pluie. Difficile dans ce cas de vivre le confinement. Fait inédit : la liberté de circuler n’est plus. Pour sortir il faut avoir un document précisant les raisons de notre sortie. Nous n’avions jamais connu cela !
Après trois mois passés à la maison nous reprenons le chemin de l’école mais attention « au ralenti ». Les élèves viennent à l’école deux jours par semaine par groupe de 15. En maternelle c’est bien plus compliqué, car c’est un jour sur trois que les enfants viennent à l’école et ce jour change chaque semaine ! Nous constatons qu’élèves et parents sont heureux de reprendre la classe malgré les lavages de mains répétés, la distanciation physique. Vous, élèves, êtes ingénieux, car très vite vous inventez des quantités de jeux à partir de vos ombres ; heureusement qu’il faisait beau !
Dans les jours qui suivent, c’est l’euphorie car tous les élèves peuvent reprendre le chemin de l’école, mais déjà ce sont les vacances !
Que de cours de gymnastique de renforcement reçus après le confinement. Petits et grands auront un corps parfait !
La pandémie nous a privés de la matinée d’intégration, de la Fête des Talents, de notre kermesse, et des Baptêmes et premières Communions.
Cette pandémie n’a pas brisé notre joie ; elle ne nous a pas brisés.
Nous avons pu finir l’école en faisant la fête avec vous, chers élèves… et les confettis étaient de la fête.
Les élèves ont pu se dire au revoir et saluer leur enseignante.
Oui, ce fut une année particulière. On ne cesse de nous dire que le virus circule encore… Puissions-nous dire, à la suite de Nietzsche : « Ce qui ne me fait pas mourir me rend plus fort. » Puissent ces événements nous rendre plus forts d’amour, de tolérance et de solidarité.
Bel été à tous !
Sœur Chantal GREFFINE, Directrice de l’École