19 Mar

Avec un cœur de père

En ce 19 mars, fête de Saint Joseph, nous revenons bien volontiers sur l’année « spéciale saint Joseph », qui a commencé le 8 décembre dernier et se terminera le 8 décembre prochain. Avec la Lettre Apostolique Patris corde (Avec un cœur de père), le Pape François rappelle le 150e anniversaire de la proclamation de saint Joseph comme Patron de l’Église universelle.

D’autre part, nous avons plaisir à vous communiquer le Message de Carême de Mgr Dominique Lebrun, archevêque de Rouen, daté de ce jour : ICI. Et sa vidéo : ICI.

 *

Un père aimé, un père dans la tendresse, dans l’obéissance et dans l’accueil, un père au courage créatif, un travailleur, toujours dans l’ombre : ce sont avec ces mots, empreints de tendresse, que le Pape François décrit saint Joseph dans la Lettre apostolique Patris corde, publiée mardi 8 décembre à l’occasion du 150e anniversaire de la proclamation de l’Époux de la Vierge Marie comme Patron de l’Église universelle. C’est en effet par le décret « Quemadmodum Deus », signé le 8 décembre 1870, que le bienheureux Pie IX a voulu que ce titre soit attribué à saint Joseph. Pour célébrer cet anniversaire, le Souverain pontife décrète une Année spéciale dédiée au père putatif de Jésus.

 La pandémie de Covid-19, écrit le Pape, nous fait comprendre l’importance des personnes ordinaires, celles qui, éloignées des projecteurs, font preuve de patience, insufflent l’espérance et veillent à créer une vraie co-responsabilité. À l’image de saint Joseph, « l’homme qui passe inaperçu, l’homme de la présence quotidienne, discrète et cachée », et qui, pourtant, « joue un rôle inégalé dans l’histoire du salut ».

 

Père aimé, tendre et obéissant

 

Saint Joseph, en effet, a exprimé concrètement sa paternité en ayant « fait de sa vie une oblation de soi, de son cœur et de toute capacité d’amour mise au service du Messie » (Paul VI, homélie, 19 mars 1966). C’est précisément en raison de son « rôle charnière qui unit l’Ancien et le Nouveau testament » qu’il a « toujours été très aimé par le peuple chrétien ». En lui, « Jésus a vu la tendresse de Dieu », « celle qui nous fait accueillir notre faiblesse », parce c’est « à travers, et en dépit de notre faiblesse » que se réalise la plus grande partie des desseins de Dieu. « Seule la tendresse nous sauvera de l’œuvre de l’Accusateur », souligne le Saint-Père, et c’est en rencontrant la miséricorde de Dieu, « notamment dans le Sacrement de la Réconciliation, que nous pouvons faire une expérience de vérité et de tendresse », parce que « Dieu ne nous condamne pas, mais nous accueille, nous embrasse, nous soutient, nous pardonne ». Joseph est également père dans l’obéissance à Dieu : avec son « fiat », il sauve Marie et Jésus et enseigne à son Fils à « faire la volonté du Père ». Appelé par Dieu à servir la mission de Jésus, «il coopère dans la plénitude du temps au grand mystère de la Rédemption et il est véritablement ministre du salut ».

 

Un père qui accueille la volonté de Dieu et du prochain

 

Dans le même temps, Joseph est « père dans l’accueil », parce qu’il reçoit Marie « sans conditions préalables », un geste important encore aujourd’hui, « en ce monde où la violence psychologique, verbale et physique envers la femme est patente ». L’Époux de Marie est celui qui, confiant dans le Seigneur, accueille dans sa vie des événements qu’il ne comprend pas, laissant de côté ses raisonnements et se réconciliant avec sa propre histoire. La vie spirituelle de Joseph « n’est pas un chemin qui explique, mais un chemin qui accueille », ce qui ne fait pas de lui un « homme passivement résigné » pour autant. Au contraire: « il est fortement et courageusement engagé », car avec la force pleine d’espérance de l’Esprit-saint, Joseph a su faire aussi place « à cette partie contradictoire, inattendue, décevante de l’existence ».

Ce que Dieu dit à notre saint, il semble le répéter à nous aussi: « N’ayez pas peur ! », parce que «la foi donne un sens à tout évènement, heureux ou triste », et nous fait prendre conscience que « Dieu peut faire germer des fleurs dans les rochers ». Non seulement Joseph ne cherche-t-il pas de raccourcis, « mais il affronte « les yeux ouverts » ce qui lui arrive en en assumant personnellement la responsabilité ». Ainsi donc, son accueil « nous invite à accueillir les autres sans exclusion, tels qu’ils sont, avec une prédilection pour les faibles ».

 

Père courageux et créatif, exemple d’amour pour l’Église et les pauvres

 

Patris corde met en exergue « le courage créatif » de saint Joseph, celui que l’on rencontre dans les difficultés et qui tire de nous des ressources que nous ne pensions même pas avoir. « Le charpentier de Nazareth, explique le Pape, sait transformer un problème en opportunité, faisant toujours confiance à la Providence ». Il affronte les problèmes concrets de sa famille, comme le font toutes les autres familles du monde, en particulier celles des migrants. « En ce sens, je crois que saint Joseph est vraiment un patron spécial pour tous ceux qui doivent laisser leur terre à cause des guerres, de la haine, de la persécution et de la misère », écrit encore le Saint-Père. Gardien de Jésus et de Marie, Joseph «ne peut pas ne pas être le gardien de l’Église », de sa maternité et du Corps du Christ : « chaque nécessiteux, chaque pauvre, chaque souffrant, chaque moribond, chaque étranger, chaque prisonnier, chaque malade est « l’Enfant » que Joseph continue de défendre», et de lui, nous apprenons à «aimer l’Église des pauvres».

 

Un père qui enseigne la valeur, la dignité et la joie du travail

 

Honnête charpentier qui a travaillé « pour garantir la subsistance de sa famille », Joseph nous enseigne aussi «la valeur, la dignité et la joie » de « manger le pain, fruit de son travail ». Ce trait caractéristique du père putatif de Jésus donne au Pape l’occasion de lancer un appel en faveur du travail, « devenu une urgente question sociale » même dans les pays où l’on vit un certain bien-être. « Il est nécessaire de comprendre, avec une conscience renouvelée, la signification du travail qui donne la dignité » qui « devient participation à l’œuvre même du salut » et « occasion de réalisation, non seulement pour soi-même mais surtout pour ce noyau originel de la société qu’est la famille ».

La personne qui travaille, « collabore avec Dieu lui-même et devient un peu créatrice du monde qui nous entoure ». De là, l’exhortation du Pape « à redécouvrir la valeur, l’importance et la nécessité du travail pour donner naissance à une nouvelle “normalité” dont personne n’est exclu ». Au regard de l’aggravation de la pandémie de Covid-19, François appelle à « revoir nos priorités » afin que nous puissions nous engager à dire: « aucun jeune, aucune personne, aucune famille sans travail ! »

 

Père dans l’ombre, décentré par amour de Marie et Jésus

 

Prenant appui sur L’ombre du Père, livre de l’écrivain polonais Jan Dobraczyński, le Souverain pontife décrit la paternité de Joseph envers Jésus comme « l’ombre sur la terre du Père Céleste ». « On ne naît pas père, on le devient », observe François, « parce qu’on prend soin d’un enfant » , en assumant la responsabilité de sa vie. Malheureusement, dans la société contemporaine, « les enfants semblent souvent être orphelins de père », de père capable « d’introduire l’enfant à l’expérience de la vie », sans le retenir ou le posséder, mais bien en le rendant « capable de choix, de liberté, de départs ». En ce sens, Joseph est qualifié de « très chaste », ce qui exprime « le contraire de la possession » : il « a su aimer de manière extraordinairement libre » pour mettre au centre de sa vie, Marie et Jésus.

Le bonheur de Joseph est dans « le don de soi »: jamais frustré mais toujours confiant, Joseph reste silencieux, sans se lamenter, mais pose toujours « des gestes concrets de confiance ». Sa figure devient d’autant plus exemplaire dans un monde « qui a besoin de pères, et refuse les chefs », « refuse ceux qui confondent autorité avec autoritarisme, service avec servilité, confrontation avec oppression, charité avec assistanat, force avec destruction ». Le véritable père est celui qui « renonce à la tentation de vivre la vie des enfants », et en respecte la liberté, parce que la paternité vécue pleinement rend le père « inutile » à partir du moment où « l’enfant est autonome et marche tout seul sur les sentiers de la vie ». Être père n’est jamais « un exercice de possession », souligne François, mais « un signe qui renvoie à une paternité plus haute », «au Père céleste ».

 

La prière quotidienne du Pape à saint Joseph

 

Patris corde, qui se conclut par une prière à saint Joseph, révèle également -à la note 10- une habitude de vie du Pape François: tous les jours en effet, « depuis plus de 40 ans », le Saint-Père récite une prière à l’Époux de Marie « tirée d’un livre français de dévotion des années 1800 de la Congrégation des religieuses de Jésus et Marie ». Le Pape explique qu’il s’agit d’une prière « qui exprime dévotion et confiance » à saint Joseph mais qui parle aussi d’un « certain défi », car elle se termine avec ces mots: « Qu’il ne soit pas dit que je t’ai invoqué en vain, et puisque tu peux tout auprès de Jésus et de Marie, montre-moi que ta bonté est aussi grande que ton pouvoir ».

 

Indulgence plénière pour « l’Année saint Joseph »

 

La Lettre apostolique Patris corde s’accompagne d’un décret de la Pénitencerie apostolique annonçant « l’Année spéciale de saint Joseph » décrétée par le Pape et la concession relative du « don d’indulgences spéciales ». Il donne aussi des indications spécifiques pour les journées traditionnellement consacrées à la mémoire de l’Époux de Marie, comme le 19 mars et le 1er mai, ainsi que pour les malades et les personnes âgées, « dans le contexte actuel de l’urgence sanitaire ».

 *

Source : Vatican News du 8 décembre 2020. La Lettre apostolique Patris corde est en intégralité ICI.