Match nul
Avant les vacances d’été, un défi avait été lancé : du piment basque ou du piment antillais, quel est le plus « fort » ? On aura vite compris que Mme Geneviève Goujon, Directrice adjointe en charge du Post-Bac, défendait les couleurs de l’Euskal Herria ; et que Sœur Chantal Greffine, Directrice de l’École, clamait jalousement la prééminence de l’Outre-Mer et, plus particulièrement, de la Gwadloup…
Rendez-vous était donné à la reprise d’août et, hier, sans tarder donc, le match fut fixé au jeudi 19, à 13h précises. Sœur Chantal avait tout préparé : des accras cuisinés avec talent et une assiette qui recevraient quelques grains ou cuillérées des piments sélectionnés. Ainsi, le très connu d’Espelette, finement moulu, rejoignit un autre, en grains, de Tardets, tous deux fraîchement remontés de la Soule, et une sauce-purée de piments, importée tout spécialement d’un très officiel comptoir parisien spécialisé en condiments de l’archipel des Caraïbes, au jaune aussi vif que la senteur qui se dégagea du pot « religieusement » décapsulé.
Et pour arbitrer ces jeux olympiques du piment, 4 membres du jury, prudents quant à la sauvegarde de leur palais, objectifs quant au maintien de l’unité de l’équipe de direction, amusés de voir nos deux championnes, ne lâchant rien, au verbe haut et à l’épice fière. À vrai dire, un invité surprise, un Habanero soi-disant angevin, qualifié sur l’étiquette d’ « explosif » et de « parfaitement bio » se mêlait à la danse, mais avec la seule et sage prétention d’un Ponce Pilate en vacances en Suisse.
Les accras ont été assaisonnés, les regards se sont observés mutuellement, les palais ont commencé à ressentir cette chaleur « surtout, sur le retour ». Mais impossible de départager les deux concurrentes : toutes deux ont reconnu le mérite de l’autre, sur le mode « y’en a… », sa force et son caractère (contendante et piment confondus) ; et le jury a approuvé unanimement et confirmé qu’il y avait bien match nul. Et si Mme Goujon, en un dernier défi, a pourléché la cuillère d’épice guadeloupéen, devant l’œil amusé d’une Sœur Chantal incrédule, cette dernière n’a pas pu s’empêcher : « Rhoooo… La prochaine fois, j’en ramène d’une catégorie infiniment supérieure ; et là… rien qu’en ouvrant le pot, vous pleurerez déjà ! ».
Dont acte, chère Sœur… Mais la prochaine fois, nous éteindrons l’incendie palatal par un ti-punch et un verre d’Izarra, avec modération bien entendu !
Jean-Dominique EUDE, Directeur aux nocicepteurs soudainement atrophiés par l’ingestion de capsaïcine