Hommage à Bernard LEGAY
En cette année où Join-Lambert, notre maison commune, a déjà connu bien des deuils, Bernard nous quitte dès les premiers jours de l’été…
De toi Bernard, mon si fidèle ami, j’ai accepté d’évoquer la mémoire, au risque de bousculer ta légendaire modestie…!
Pour le plus grand nombre, Bernard était d’abord un géographe, notre GEOGRAPHE reférent. Il connaissait chaque lieu du monde, s’intéressait aux hommes qui l’habitent, le transforment et, trop souvent, le détruisent. La géopolitique, les relations entre les pays, les cultures le passionnaient… Les injustices, les inégalités dans le monde le préoccupaient profondément.
Cette curiosité, cette réflexion, l’ENSEIGNANT les a transmises à ses collègues, à ses èlèves. Il fut un professeur très rigoureux, perfectionniste. Personne n’a oublié le tableau noir de la salle 275, LA salle de classe de Monsieur Legay. Les croquis, les plans, la haute et élégante écriture faisaient notre admiration. Jamais personne n’a osé effacer ce chef d’œuvre méticuleusement construit chaque jour, bien avant l’heure du début des cours. L’investissement professionnel de Bernard imposait le respect, la préparation de ses cours… la correction des copies… chaque mot choisi soigneusement, chaque phrase ciselée… pour nos anciens élèves, jeunes gens aux tempes aujourd’hui blanchies, il reste le plus passionnant professeur qu’ils aient jamais connu.
Quel bonheur Bernard de travailler à tes côtés…
Avec ceux de sa génération, nous tous qu’il appelait « grognards » ou le « vieux fond de maison », combien de moments heureux partagés…; les repas au self, éclairés de sa réflexion, égayés de son humour toujours percutant, les récréations… les discussions le soir après les cours.. tous ces instants qui étaient notre quotidien. Bien longtemps après son départ, il était toujours parmi nous, nous évoquions son souvenir, ses boutades, sa pensée… « Bernard aurait dit … Bernard aurait pensé… »
Je guette si souvent encore la mobylette bleue, engin d’un autre âge régulièrement rafistolé, quand je traverse la place Beauvoisine…
Bernard tu vas tellement me manquer….
Parce qu’avant tout, tu étais mon AMI, un homme hors du commun, le MEILLEUR D’ENTRE NOUS…
Nous avons passé tant de moments ensemble : ces soirées, ces nuits même où tu réussissais à effacer le découragement de mes débuts professionnels ou les déceptions de ma vie personnelle… des moments de bonheur aussi… la montagne, les dunes de l’Aber, l’océan, le bateau… et depuis quelques années les très longues conversations téléphoniques au cours desquelles ta sensibilité s’exprimait… homme exceptionnel qui savait dire ce qu’il ressentait…
Exceptionnel… En tout Bernard l’était…
Généreux
Il donnait tout et était émerveillé quand il recevait un peu…
Prévenant et délicat
Il n’était que précautions, attentions… ne pas déranger, ne pas blesser les autres
Courageux
Toujours… en particulier quand il fut terrassé par la maladie… pas une plainte… il a lutté,
s’est adapté, a accepté les soins, l’insuline, l’assistance respiratoire
Exceptionnel…
Jamais il ne condamnait, toujours il essayait de comprendre ceux qui l’entouraient, surtout quand ils lui infligeaient des blessures. Chez le plus médiocre, le plus caractériel d’entre nous il s’ingéniait à découvrir une richesse, une pépite enfouie…
Aucun homme n’est irremplaçable, affirme-t-on… Je m’inscris en faux… aucun homme… sauf toi, Bernard… Pardonne moi toutes mes négligences… Pardonne à ceux qui t’aiment de n’avoir pas toujours pris le temps de te le dire… mais je sais que tu as déjà pardonné…
Repose en paix… Tu seras toujours là, vivant dans le cœur de tes proches, dans mon cœur… Au revoir, Bernard.
Martine ROTH