Une incroyable aventure
Dans les jours qui ont précédé ces vacances d’été, j’ai reçu un mail bien sympathique : un ancien élève de l’Institution, âgé de 96 printemps, venait de commettre un livre extraordinaire et « fascinant », racontant une « incroyable aventure »… Par ces mots alléchés, ni une ni deux, je passai commande auprès de l’éditeur, bien décidé à m’émerveiller de ce récit.
Incroyable destin qu’un couple décidé à en sauver un autre, prisonnier derrière le rideau de fer dans les années soixante. Extraordinaire exfiltration depuis la Yougoslavie jusqu’à Paris : un récit aussi authentique que passionnant…
« En 1964, l’Est est symbolisé par le rideau de fer. A l’Ouest, nous ne pouvions imaginer ce qui s’y passait : l’enfer, l’oppression. Marc, cadre supérieur dans l’industrie du papier et son épouse Bernadette passent leurs vacances en Yougoslavie, à Primosten, sur l’Adriatique. Liberté totale. Chaque matin, mise à l’eau de leur voilier, un 420. Hugo venait les retrouver à bord à la nage, sans être vu du rivage. Discrétion totale. Médecin tchèque, il devenait un autre homme. Il était libre et se racontait, se racontait encore et encore, intarissable sur sa vie en Tchécoslovaquie, ses tentatives de fuites, ses échecs, puis son internement en camp de concentration, à Jachymov. Entre eux, une amitié naît… ainsi que l’engagement insensé de Marc et Bernadette. Un récit en tout point authentique. »
Mais les pages concernant l’Institution et la ville de Rouen, à l’époque de la guerre, ne sont pas les moins intéressantes…
Arrivé à l’Institution Join-Lambert en janvier 1942, orphelin de père et de mère, le jeune Marc Anger était accueilli en classe de Seconde par l’abbé Devaux, professeur principal.
« Nous allions en classe à Join-Lambert, la principale institution religieuse de Rouen. J’y suis entré en seconde, au deuxième trimestre. […] J’avais été surpris de voir que [l’école] était divisée en deux avec un mur garni de barbelés au milieu de la cour de récréation. La moitié de l’école était occupée par les Allemands, on les voyait vivre, faire de l’exercice, balayer la cour. Quant à nous, on menait notre vie d’écoliers. » (page 24)
Quelques souvenirs pêle-mêle, au-delà du livre :
« Maths-Elem avec le Piche (l’abbé Piednoël) que j’ai adoré : il aurait fait aimer les maths à un bourricaut ».
L’Abbé Piednoel, encore lui : un jour, en classe, « Anger, venez nous parler de telle équation, que j’ai pris le soin de poser au tableau ». Je vais au tableau,…que je remplis jusqu’en bas…réussite totale, pas mécontent ! Le Piche me complimente : « Vous venez de constater le bon résultat… « çà , c’est la solution BESOGNEUSE, je vais vous montrer maintenant la solution ELEGANTE ». TROIS LIGNES de calcul…et le résultat final. Et il a ajouté : « Dans la vie vous serez confronté à de multiples problèmes, pensez toujours à la solution élégante, toujours la plus sobre. »
Enfin : « Qui m’a appris à écrire ? L’abbé Devaux ; et mieux : qui m’a appris à vivre et à m’exprimer ? »
Bonne lecture !
Jean-Dominique EUDE, Directeur
Un Voilier et… la Liberté, Marc ANGER, 2023, éditions L’Harmattan, 225pp., 21 €, ISBN 978-2-14-026862-5