Dans les coulisses des emplois du temps
Parmi les étapes qui préparent une nouvelle année scolaire, l’élaboration des emplois du temps reste, de toute évidence, une des pièces essentielles de l’horlogerie.
À l’Institution, dès mi-janvier, les professeurs formulent des vœux personnels et pédagogiques ; ces vœux forment une première saisie, différente d’une année à l’autre. Dans un deuxième temps, les moyens horaires sont positionnés, prévisionnellement, pour la rentrée suivante ; nous sommes alors en février – c’est ce qu’on appelle le TRM, le Tableau de Répartition des Moyens. Cette première phase pourrait s’assimiler à un brouillon.
Puis, à cette première esquisse, des rencontres et des conseils pédagogiques vont apporter, là encore chaque année, des affinages et des amendements, ne serait-ce que par rapport à l’année en cours : « Dans telle classe, pour telle matière, il serait opportun de créer une séance de 2h » ; « Le nombre de latinistes prévus pour la rentrée exige la création d’un nouveau groupe, qui fonctionnera sur deux classes » ; « Les laboratoires ou les installations sportives ne sont pas disponibles sur cette demi-journée ». Fin mai, les premières « fiches de cours » sont actualisées et les heures pointées, une à une, en comparaison de la DHG (Dotation Horaire Globale) et des horaires officiels de l’Éducation nationale ; elles sont finalisées lorsque les équipes pédagogiques sont arrêtées – en général, mi-juin, lorsqu’on commence à connaître les premiers résultats du « mouvement des maîtres » (départs et arrivées de professeurs).
C’est alors que les contraintes liées aux professeurs enseignant sur deux établissements sont enregistrées afin d’assurer une compatibilité maximale. Les cours complexes (plusieurs classes, plusieurs professeurs, plusieurs locaux) sont positionnés et « verrouillés » (on ne peut plus les déplacer) sur des créneaux communs, disponibles et qui paraissent astucieux et équilibrés. Enfin, les cours simples « moulinent » (le logiciel place les cours en tenant compte de tous les paramètres préprogrammés) : c’est l’instant-clé (immortalisé ci-dessous, sur la photo, lorsque Mme Charlotte Alempijevic déclenche le placement automatique des cours) !
Sur les 1307 heures de cours donnés par semaine dans l’Institution (près de 50.000 heures/an), le logiciel se révèle incapable d’en placer certains : chaque année, entre 50 et 75 cours sont en échec ; la sanction tombe : « Aucune place disponible ». C’est alors que les cerveaux aiguisés de notre équipe de direction entrent en action : il y a obligation de résultat, car il faut trouver, pour chacun de ces cours en échec, et un à un, une place. Sudoku géant, Tetris infernal, Rubik’s cube à 100 dimensions : l’emploi du temps est alors un peu tout cela à la fois. Lorsque le rythme ralentit et que la chaleur estivale s’accompagne des premières langueurs, une pièce de l’établissement rassemble des neurones hyperactifs à la recherche de solutions… Ça tricote et détricote, au gré d’hypothèses souvent plus audacieuses les unes que les autres.
Et puis, une fois tous les cours entrés, parfois au chausse-pied, c’est le temps de l’affinage : relecture des vœux et vérification qu’ils sont respectés au maximum ; relecture des emplois du temps des classes et vérification qu’ils font sens, tant en termes d’équilibre et de répartition des matières ; relecture des emplois du temps des professeurs avec une dernière chasse aux scories dans un esprit de justice à l’égard de tous.
Il est alors temps de les imprimer – nous sommes autour du 12 ou 13 juillet – et de les mettre sous enveloppe, avec la mention de rigueur « sous réserve de modifications »… puisque, chaque été, des nominations de dernière heure nous obligent à une ultime révision. Ultime ? non… car, il reste encore une étape : celle de vérifier que rien n’a été oublié et que tout fonctionne concrètement. En d’autres termes, les deux premières semaines de cours pendant lesquelles il est vérifié que toutes les options « passent », qu’aucun local n’a été oublié, que le quatuor « élève-professeur-classe/groupe-local » est bien synchronisé et qu’il peut fonctionner : les emplois du temps sont dits « gelés ». Puis, à l’issue de cette épreuve du feu, quelques derniers aménagements, à la marge, et les emplois du temps sont véritablement lancés pour l’année. Nous sommes alors au mi-septembre…