Inauguration de l’Espace Mère Saint-Joseph 21 sept. 2010
Chères Sœurs,
Mesdames et Messieurs,
L’honneur me revient de dire quelques mots, à l’occasion de l’inauguration de l’Espace Mère Saint-Joseph. C’est une très ancienne tradition, dans ces lieux, que de donner le nom des personnes qui nous sont chères aux bâtiments et espaces que nous arpentons quotidiennement. Ainsi, le bâtiment des Terminales s’appelle-t-il « Espace Père Morin » du nom de mon prédécesseur de vénérée mémoire ; la salle des Professeurs « Salle André Carron » du nom d’un professeur d’Anglais qui a marqué des générations par sa profonde gentillesse et sa pédagogie aussi pertinente que décalée ; la cour intérieure des Lycéens « Square Chatelain » du nom d’un CPE – on disait alors Surveillant Général – qui redressa pas mal de chemins tortueux ; et, juste à côté de nous, les « Préaux Julien », du nom d’un homme d’entretien qui passa sa vie à donner tout le lustre nécessaire à la cour (qu’on appelait alors « Cailloux plage »… tout un programme) et qui avait le bon goût de s’appeler Julien Préaux : un jeu de mots facile, certes, mais tellement sympathique !
Lorsque nous avons travaillé sur la fusion de nos trois établissements, nous avons souhaité dès le début que nous puissions donner, à l’intérieur de l’Institution, puisque tout se regroupait géographiquement ici, un nom à un lieu qui matérialiserait l’Ecole Beauvoisine, sa raison d’être et qui rappelle une de nos deux co-tutelles. Votre adhésion a été immédiate, ma Sœur, et je vous en sais gré. Et lorsque la proposition a été faite de donner le nom de Mère Saint-Joseph, votre fondatrice, à la Maternelle, je me souviens que vos yeux ont acquiescé immédiatement et je crois même avoir décelé ce petit sourire de contentement dont vous êtes la spécialiste : sourire qui est à la fois joie, reconnaissance, abandon et humilité.
Permettez-moi, bien entendu, de vous dire quelques mots sur Mère Saint-Joseph, la fondatrice des Sœurs du Sacré-Cœur de Jésus de Saint-Aubin-lès-Elbeuf.
Mère Saint-Joseph, alias Geneviève Fréret, est née le 21 novembre 1790, dernière d’une famille assez aisée de 5 enfants. Privée de l’avant-bras droit, cette infirmité ne l’empêche pas pour autant de se donner dans une vie très active et de s’abandonner au projet que Dieu a sur elle. Elle passera un an chez les Dames de la Providence, au 16 rue du Champ des Oiseaux, juste à côté d’ici, pour apprendre le métier d’institutrice. En novembre 1818, une première adjointe la rejoint. On parle parfois, pour cette date, de « l’acte de fondation de la Congrégation ». Cinq ans plus tard, en 1823, elle refuse la direction d’une Communauté rouennaise pour rester disponible à ce que Dieu attend d’elle. Les premiers vœux sont prononcés en octobre 1824 : 10 jeunes filles qui donnent leur vie pour l’instruction des enfants, et en particulier des enfants pauvres.
419 sœurs en 1856, lorsqu’elle entre dans la vie de Dieu, le 3 juillet, après une vie particulièrement chargée et chahutée par toutes sortes d’épreuves. Son biographe rapporte les paroles de la mourante à la sœur infirmière : « Aimes-tu les pauvres ? – Oui, ma Mère. Puis une seconde fois : « Aimes-tu les pauvres ? – Mais oui, ma bonne Mère, vous le savez bien. » Enfin, une troisième fois : « Aimes-tu BIEN les pauvres ? – Oui, ma Mère, presque autant que vous. » A la suite de Mère St Joseph, vous vous efforcez, mes Sœurs, de vivre ce testament spirituel et, ainsi, d’être proches de ceux qui sont privés d’argent, de santé, d’amour, ou d’espérance, en bref : voir le Christ dans chaque personne rencontrée, Le suivre avec Marie, dans une vie simple et disponible.
Une école est bien sûr un lieu privilégié pour cet apostolat : communiquer aux jeunes l’Amour dont nous sommes aimés, éveiller à la Foi, soutenir le plus faible, donner de l’Espérance à celui qui souffre. Si vous me permettez un jeu de mots qui résume votre esprit et qui tente une synthèse entre la Contemplation et l’action, c’est ce que j’ai coutume d’appeler la « contemplaction ». Vous êtes des contemplactives, mes sœurs !
Grâce à la plaque qui sera dévoilée dans quelques instants, nous pourrons avoir cette pensée à chaque fois que nous passerons devant : aimons-nous BIEN les pauvres ? Pauvres sur le plan matériel, sur le plan intellectuel, sur le plan spirituel… Et, si nous savons ne pas être simplement contemplatifs ou actifs, mais si nous savons être vraiment contemplactifs… alors, nous aurons été fidèles à ce Mère Saint-Joseph a toujours souhaité : « Voir Dieu en tous et en toutes choses ».
Jean-Dominique EUDE, Directeur